En avril 2010, je m'étais penchée sur la toxicité des pigments et du lieu éventuel où ils pouvaient être préparés par alchimie. [Lire l'article ici]
J'avais ajouté à ma liste l'orpiment, évidemment d'après la description qu'en faisait Cennini dans son Livre de l'art. Or depuis peu, je lis que l'orpiment artificiel était connu au XVIIIème siècle, voir au mieux au XVIIème siècle. Seul notre auteur italien l'envisage comme étant fait par alchimie.
Pour y voir plus clair, je me réferre au glossaire de Bernard Guineau qui classe la recette §109 des Experimenta et coloribus de LeBègue comme étant plutôt celle de l'orpiment artificiel.
§109 Ad faciendum colorem croceum Accipe unam unciam de orpimento et unam unciam de sulfure vivo et distempera istum coloremcum lacte de figu et est factum
Revenons à l'édition de Colette Delroche. Elle relève la note de Brunello concernant l'orpiment et identifie l'orpiment artificielle dans la recette. Ainsi on commença à le préparer artificiellement en fondant le réalgar et le soufre. Un peu plus loin, à la recette de réalgar par Cennini, la traductrice cite une note de Tambroni en disant que cette matière est composé de chaux vive et d'arsenic. On appelait aussi le réalgar, l'orpiment rouge.
Le mot réalgar est issu de l'arabe. Au magrheb, on se servait de ce terme pour désigner aussi l'arsenic. On lit ailleurs que lLe terme "arsenic" s'appliquait à l'orpiment chez les alchimistes (Guy Loumier). "Orpin, synonyme d'orpiment, orpin qui aultrement est appellé arsenic est une vaine de terre qui a couleur d'or". 1372 Livre de propriété des choses
Orpiment jaune, orpiment rouge, en tout cas ils contiennent tous les deux de l'arsenic, arsenic qui serait mêlé à du souffre pour faire une couleur jaune croceus, si l'on en croit la recette.
Cennini nous donne un indice assez intéressant pour cette couleur artificielle et faite par alchimie, il dit que l'on soigne les éperviers contre une certaine maladie qui les frappe, au moyen de cette couleur. D'où le verbe orpimenter, nourrir d'orpiment les oiseaux de venerie.
Voici quelques termes d'ancien français pour le mot orpiment :
reluisanscom ors pieumens, qui reluissent con orspigments
orpieument, souffre ou orpigment citrin (H de Mondeville)
noef livres et demye de ortpiemin a luy vendut 1516
li somiers d'orpieument (13ème siècle).
On trouve aussi comme autre indication chez Mrs Merrifields, l'orpiment brûlé chez les espagnols ou oropimente quemado (jalde, cf croceus)
Ces indices pourraient nous faire croire à l'existence d'un jaune orpiment artificiel, mais si on lit Louisa Dunlop sa fabrication serait plus tardive.
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