Bien que titulaire d’un diplôme d’Histoire de l’art et Archéologie, je n’ai jamais participé à des fouilles. En revanche, durant mes études, j’ai amorcé une fouille visuelle des miniatures avec Danièle Alexandre-Bidon, archéo-iconographe. Elle est la co-auteure d’un article : « L'archéo-iconographie: pour une approche différente des miniatures médiévales ». Etaient mis sur le même plan, les sources écrites, archéologiques et iconographiques. Voici ce qui était dit : « Si l’image est mise à l’épreuve de la fouille, l’inverse est donc vrai également : outre l’objet dans son contexte, elle en indique aussi la gestuelle de l’utilisation, ses usages secondaires et d’éventuelles utilisations détournées, plus rarement transmises par l’archéologie ». L’objet, s’il est au centre des préoccupations, comme dans une fouille de terrain, l’image a cela de plus qu’elle permet de voir comment cet objet est utilisé. Aujourd’hui, j’étudie les images de peintres et de scribes sous cet angle, comme pourrait le faire un historien de la civilisation matérielle. Les outils de travail de l’enlumineur et les instruments du scribe ont été peints, de manière très nombreuse, par les enlumineurs et les peintres de panneaux. Au chercheur et à la praticienne que je suis, de scruter avec attention ces objets, parfois très petits et de les inventorier à la manière de l’archéologue. En guise de numéro d’inventaire, on trouve le lieu de conservation de l’œuvre peinte sur parchemin, sa côte et son folio. Cette notion d’inventaire avait déjà été évoquée par les auteures cités ci-dessus. Dans leur article « Scènes de la vie d’artiste au Moyen Age : Outil de travail et vie professionnelle », Danièle Alexandre-Bidon dressait l’inventaire des biens du peintre « tel qu’aurait pu le dresser un notaire, mais de façon imagée, concrète, telle que le découvrirait l’archéologue ». Si l’image permet d’identifier la nature de l’objet (bois, métal, verre, céramique), et notamment par sa couleur, elle permet aussi aux outils et notamment ceux du peintre, de trouver une fonction nouvelle. En effet, là où ces objets, seraient en fouille, revendiqués par les spécialistes de l’alimentation, les enluminures représentant des peintres, montrent des outils en situation. Ainsi, Danièle Alexandre-Bidon range les godets et cruchons de terre, flacons et mortiers parmi les biens du peintre. Et elle souligne : « La miniature, et c’est là un de ses grands apports, permet de reconnaître l’occurrence d’une utilisation « détournée » des objets du quotidien en outils de travail ».
Articles cités :
. BIDON-ALEXANDRE (D.), CLOSSON (M.), L'archéo-iconographie: pour une approche différente des miniatures médiévales, dans Gazette du livre médiéval [3, 1983] pp.4-5
. BIDON-ALEXANDRE (D.), CLOSSON (M.), Scènes de la vie d’artiste au Moyen Age : Outil de travail et vie professionnelle, dans Artistes, artisans et production artistique au Moyen Age, volume III : Fabrication et consommation de l’œuvre, Picard, 1990, pp.557-575.
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