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Le Feutre Vert des Scribes

 

Le copiste, affairé à ses travaux d’écriture est concentré et force sur ses yeux. Il n’a pas forcément de bésicles pour le confort de la vue. Elles n’apparaissent qu’au XIVe siècle. Barthélemy de l’Anglais écrit sur la fatigue oculaire et donne un remède à cela. Danièle Alexandre-Bidon l’a souligné : « […] une application du discours théorique sur les vertus apaisantes du vert, qui s’exprime fortement déjà au XIIIe siècle : Barthélémy l’Anglais recommande cette couleur pour les tapis de bureau des scribes, soumis à la fatigue oculaire » (Dans l’atelier de l’apothicaire. Histoire et archéologie des pots de pharmacie XIIIe-XVIe siècle, Paris, 2013, p.101 ). La couleur verte aurait donc des vertus apaisantes lorsque l’on sollicite la vue pour notamment, des travaux d’écriture.

On remarque que de nombreux feutres de couleur verte sont posés sur les pupitres des scribes. Alexandre Neckham précise bien que le scribe a une planche couverte d’un feutre. Scriptor habeat epicausterium centone coopertum. Le mot latin centone est glosé en français par le mot feutre ; epicausterium est glosé en latin par les mots talem asserem. L’auteur parlait plus haut d’une planche, pluteum sive asserem (aser étant aussi les ais de bois).Victor Gay dans son Glossaire archéologique du Moyen Age et de la Renaissance, nous dit ceci au mot feutre : « Le feutre est une étoffe de poil ou de laine, non tissée mais rendue compacte par l’opération du foulage. La matière du feutre se travaillait, au Moyen Age, en pièces et en chapeaux ».

Voici quelques exemples iconographiques de ce fameux feutre de couleur verte.

Saint Mathieu, Angleterre, 1220, Cambridge, Trinity College, ms B.5.3, folio 4v

Saint Mathieu, La Haye, KB 10 B 21folio117v

 

 

St jean par Gabriel Mälesskircher, 1478, Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid Nº INV. 235 (1928.17)

Voici des étoffes vertes posées sur une table :

Christine de Pizan, Londres, British Library Harley 4431 folio 4

 

st Mathieu, Heures Rothschild, Heures de Jeanne de Castilles c. 1500, Londres, British library Add 35313 folio 14v de londres,

 

 

 

 

 

 

Les sièges pliants en bois des écrivains et des peintres

Je vous propose de lire un article que j'ai écrit et mis en ligne sur le site academia.edu.

J'y traite d'un siège pliant en bois que l'on trouve utilisé par les écrivains et les peintres du XVe siècle.

C'est ici : Cliquez ICI

 

 

Pupitres avec proéminence

Toujours dans mon corpus de scribes ayant à disposition une corne-encrier, nous trouvons des enluminures figurant un pupitre ou une planche avec une proéminence servant à mettre l'encrier. Ces exemples sont tous datés du XIIe siècle et sont associés à trois saints : Jean, Mathieu et Marc. Notez que les cornes-encriers sont de différentes couleurs. Voici les images :

Saint Jean, 1140-1150, Salzburg ?
Oxford, Bodleian library, Canon Bibl. Lat. 76 folio 169

 

Saint Jean, 2^e quart du XIIe siècle, Salzburg
Oxford, Bodleian library, Canon Bibl. Lat. 60 folio 109v

 

Saint Mathieu, XIIe siècle
Autriche, Linz, Oberösterreichische Landesbibliothek Codex 195 (neu 415) folio 17v 

 

Saint Mathieu, 1170-1180, Freising (Tergensee ?)
Munich, Bayersches staatsbibliothek Clm 21580 folio 48

 

Saint Marc, 1170-1180, Freising (Tergensee ?)
Munich, Bayersches staatsbibliothek Clm 21580 folio 130

L’archéo-iconographie appliquée à l’étude des peintres et des scribes

Bien que titulaire d’un diplôme d’Histoire de l’art et Archéologie, je n’ai jamais participé à des fouilles. En revanche, durant mes études, j’ai amorcé une fouille visuelle des miniatures avec Danièle Alexandre-Bidon, archéo-iconographe. Elle est la co-auteure d’un article : « L'archéo-iconographie: pour une approche différente des miniatures médiévales ». Etaient mis sur le même plan, les sources écrites, archéologiques et iconographiques. Voici ce qui était dit : « Si l’image est mise à l’épreuve de la fouille, l’inverse est donc vrai également : outre l’objet dans son contexte, elle en indique aussi la gestuelle de l’utilisation, ses usages secondaires et d’éventuelles utilisations détournées, plus rarement transmises par l’archéologie ». L’objet, s’il est au centre des préoccupations, comme dans une fouille de terrain, l’image a cela de plus qu’elle permet de voir comment cet objet est utilisé. Aujourd’hui, j’étudie les images de peintres et de scribes sous cet angle, comme pourrait le faire un historien de la civilisation matérielle. Les outils de travail de l’enlumineur et les instruments du scribe ont été peints, de manière très nombreuse, par les enlumineurs et les peintres de panneaux. Au chercheur et à la praticienne que je suis, de scruter avec attention ces objets, parfois très petits et de les inventorier à la manière de l’archéologue. En guise de numéro d’inventaire, on trouve le lieu de conservation de l’œuvre peinte sur parchemin, sa côte et son folio. Cette notion d’inventaire avait déjà été évoquée par les auteures cités ci-dessus. Dans leur article « Scènes de la vie d’artiste au Moyen Age : Outil de travail et vie professionnelle », Danièle Alexandre-Bidon dressait l’inventaire des biens du peintre « tel qu’aurait pu le dresser un notaire, mais de façon imagée, concrète, telle que le découvrirait l’archéologue ». Si l’image permet d’identifier la nature de l’objet (bois, métal, verre, céramique), et notamment par sa couleur, elle permet aussi aux outils et notamment ceux du peintre, de trouver une fonction nouvelle. En effet, là où ces objets, seraient en fouille, revendiqués par les spécialistes de l’alimentation, les enluminures représentant des peintres, montrent des outils en situation. Ainsi, Danièle Alexandre-Bidon range les godets et cruchons de terre, flacons et mortiers parmi les biens du peintre. Et elle souligne : « La miniature, et c’est là un de ses grands apports, permet de reconnaître l’occurrence d’une utilisation « détournée » des objets du quotidien en outils de travail ».

 

Articles cités :

. BIDON-ALEXANDRE (D.), CLOSSON (M.), L'archéo-iconographie: pour une approche différente des miniatures médiévales, dans Gazette du livre médiéval [3, 1983] pp.4-5

. BIDON-ALEXANDRE (D.), CLOSSON (M.), Scènes de la vie d’artiste au Moyen Age : Outil de travail et vie professionnelle, dans Artistes, artisans et production artistique au Moyen Age, volume III : Fabrication et consommation de l’œuvre, Picard, 1990, pp.557-575.

 

 

La Vierge Comme Modèle de Saint Luc

Saint Luc, saint patron des peintres et des médecins est connu pour ses représentations entrain de peindre la Vierge Marie avec ou sans l'enfant Jésus. Je vous propose de découvrir quelques une de ces peintures. 

Nous pouvons aussi voir des variantes dans les images. Marie avec l'enfant peut se tenir à côté de saint Luc écrivant ou bien sur un tableau accroché au mur.

Saint Luc peignant le Vierge Marie, Paris BNF latin 920 folio 32v

Saint Luc peignant la Vierge à l'enfant, Derick Baegert, Munster

Saint Luc écrivant, la Vierge à l'enfant Jésus se tenant derrière lui, Hermen Rhode, Lubeck

Saint Luc écrivant avec un tableau de la Vierge à ses côtés,
New York, Pierpont Morgan Library 834 folio 15

Saint Luc écrivant, portrait au mur de la Vierge à l'enfant,
Amiens, Bibliothèque muniscipale, ms Lescalopier 20 folio 17v 

Saint Luc tenant le portrait de la Vierge Marie,
Tours, Bibliothèque municipale 2042 folio 8

 

Les coquillages de couleurs

Les enluminures nous montrent des scènes représentants des peintres et des scribes. Parmi celles-ci, on y trouve des contenants des couleurs à peindre et des encres pour écrire. Il y a des coquillages contenants des couleurs et des cornets contenants de l’encre.

L’usage des couleurs est immédiat. L’œuvre peinte est entrain de se faire et les coquillages de couleurs sont consommés par l’artiste. Les couleurs peuvent être fraîches, c’est-à-dire plus ou moins liquides ou bien sèches. Dans ce dernier cas, elles sont humidifiées avec de l’eau ou bien avec une détrempe à la gomme ou à l’oeuf. On voit parfois, à côté des coquillages, un récipient pouvant contenir cette détrempe.

 

On trouve par exemple en Angleterre, un coquillage de couleurs retrouvé en fouille.

Je vous renvoie à un article précédent sur les coquilles marines utilisées pour mettre les couleurs : Voir l'article.

 

 

 

Les Pigments en Reconstitution Historique

Je me documente sur les pigments historiques, sur les réceptaires et sur les techniques anciennes. J'ai commencé petit à petit à rechercher de manière exhaustive, des infos sur les matériaux utilisés par les enlumineurs comme les pigments et les colorants au moyen âge. Je me suis tournée vers la minéralogie pour les pigments d'origine minérale, vers les teintures végétales pour les colorants végétaux. Ceci pour rassembler une collection de "matériaux médiévaux" qui me permettent d'illustrer mes propos en reconstitution historique. Je peux alors montrer les différentes phases de transformation des pigments et colorants. S'ajoutent à cette collecte, les récipients dans lesquels ont été fabriquées les couleurs.